L’intégration scolaire à l’Académie Royale des Beaux-Arts

À l’Académie Royale des Beaux-Arts, l’intégration des élèves à besoins spécifiques dans l’enseignement secondaire artistique existe depuis plusieurs années. Organisée en partenariat avec l’École Intégrée, elle offre à cinq élèves la possibilité d’expérimenter un enseignement décloisonné.

Thématique chère au Programme de politique générale de la Ville de Bruxelles et au Plan stratégique de l'Instruction publique, l’intégration scolaire permet aux élèves à besoins spécifiques de poursuivre sa scolarité dans un enseignement ordinaire. Une intégration qui passe notamment par la mise en place d'aménagements raisonnables d'ordres matériel, pédagogiques et organisationnels.

Dans cette perspective, de nombreux établissements adaptent leurs structures et leurs activités afin d’accueillir ces jeunes au mieux et de manière à favoriser les apprentissages. C’est le cas à l’Académie Royale des Beaux-Arts, dans l’enseignement secondaire artistique, où cinq élèves aux profils différents y étudient. On y retrouve notamment Insaf et Dominika, deux élèves sourdes de 5e année.

Un enseignement basé sur une collaboration inter-établissements

Afin d’accompagner au mieux l’intégration de ces élèves, plusieurs intervenants sont sollicités, comme des interprètes ou des logopèdes de l’École Intégrée. C’est donc en présence de leur interprète en langue des signes, Véronique Guindé, qu’elles ont pu partager leur expérience au sein de l’école : « Ce que je préfère à l’Académie, confie Insaf, c’est que c’est une grande école et que les classes sont agréables. Il y a aussi une belle architecture et un bon accueil. » Un avis partagé par sa camarade Dominika : « Ce que je préfère c’est la pratique et le contact avec les gens. D’ailleurs, je donne parfois des cours de langue des signes aux autres élèves ! L’aspect social est très important pour moi. C’est aussi pour cette raison que j’ai choisi l’option danse. »

Pour ces deux élèves en surdité profonde, la poursuite d’un enseignement en intégration va de pair avec une organisation et une énergie particulières : « Au niveau de la communication, c’est un peu plus compliqué ici parce que les autres élèves, qui sont entendants, ne connaissent pas la langue des signes, explique Insaf. Pour moi, c’est plus facile à l’École Intégrée, parce que tout le monde se connaît et échange de la même façon. Étant de nature timide, ça m’arrange mieux. Mais heureusement, Dominika est là. Nous nous connaissons depuis la 1re primaire ! ».

Des outils et des équipements adaptés

Pour soutenir ces élèves dans leurs apprentissages, des équipements sont mis à leur disposition, comme un ordinateur portable avec un logiciel de retranscription intégré. Une avancée que les élèves relativisent, notamment en raison de la situation sanitaire : « L’exactitude de la retranscription est plus aléatoire à cause du port du masque, et certains tics de langage peuvent rendre une phrase incompréhensible. Mais ça reste un logiciel qui nous permet d’économiser du temps et de l’énergie, donc c’est très positif. »

Par ailleurs et pour ne pas trop pénaliser ces élèves avec le port du masque, l’établissement a dû s’adapter et trouver une solution. Les professeurs donnant cours aux élèves sourds et malentendants portent dorénavant un masque inclusif transparent permettant la lecture labiale.

L’adaptation et l’autonomie comme maître-mots

Dans une démarche intégratrice, c’est d’abord sur l’enfant ou le jeune que repose l’effort d’adaptation à l’école et à ses normes de fonctionnement. Une démarche vécue différemment par les interrogées : « J’ai l’impression d’avoir développé une autre personnalité, d’être une autre Dominika ! Au début, on se sent perdue, on ne sait pas qui on doit regarder… S’adapter demande beaucoup d’énergie et les élèves sourds peuvent avoir peur de changer d’environnement, parce que c’est un bouleversement très difficile. Souvent, les entendants ne réalisent pas les efforts que ça implique. »

« En intégration, nous sommes une vingtaine en cours, complète l’interprète. Même si on peut se sentir un peu perdu au début, on découvre vite un nouvelle liberté ». Une liberté d’autonomie renforcée par un sentiment d’acceptation des autres élèves : « Une fille est récemment venue m’aborder en me disant qu’elle avait décidé d’apprendre la langue des signes pour pouvoir communiquer avec moi ! J’ai le sentiment que l’école accueille tout le monde et je ne me sens pas considérée comme une élève différente. C’est agréable de se sentir reconnue et à sa place », explique Dominika.

Une école qui prône l’altérité et une équipe pédagogique soudée

La professeure de danse Julie Verbinnen complète le propos de ses deux élèves : « Je trouve important de favoriser l’accessibilité et le mélange des enseignements. On peut prendre en compte la différence sans nécessairement en faire. Ici, on est une équipe, on fonctionne ensemble. Dès qu’il y a un problème, on en parle, on trouve des solutions. Avec la danse, Dominika a trouvé un autre moyen d’expression, et je la sens épanouie dans son choix d’option. »

Une opinion partagée par la directrice de l’école, Isabelle Delcourt : « Aujourd’hui, en moyenne un élève sur trois a besoin d’un encadrement spécifique. Pas en termes thérapeutiques, mais en termes d’adaptation. C’est ce que nous faisons. L’Académie est avant tout un lieu d’accueil, basé sur une culture de la tolérance et de l’altérité. Nous accueillons par ailleurs beaucoup de profils différents, y compris des transgenres et des personnes non-binaires. Entre les élèves, c’est naturel, et ça l’est pour nous aussi. C’est ça la spécificité de notre établissement. »

Véronique, Dominika et Insaf
Véronique Guindé, Dominika et Insaf épellent visuellement le mot "école"


Vous souhaitez plus d’informations sur la prise en charge des besoins spécifiques et les troubles d’apprentissage, bénéficier d’une formation ou monter un projet ? N’hésitez pas à vous adresser à la cellule Besoins spécifiques de l’Inspection pédagogique auprès de Camille Herve : camille.herve@brucity.education

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Gemaakt 17/03/2021 (bewerkt op 17/03/2021)
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