En avril dernier, dix élèves de l’Institut Diderot ont réalisé une vidéo de sensibilisation sur le cyberharcèlement. Pour tous, l’exercice scolaire s'est transformé en projet formateur. Rencontre.
« Aujourd’hui, un élève sur trois est victime d’harcèlement scolaire et de cyberharcèlement »
« 16% des élèves sont régulièrement victimes de harcèlement »
« 14% ont des comportements harceleurs réguliers »
C’est sur ces chiffres que démarre la vidéo réalisée par des élèves en 5ème TTR à l’institut Diderot.
Filmée avec un simple smartphone, cette fiction de sensibilisation au cyberharcèlement retrace l’histoire d’un élève harcelé par ses camarades au point de commettre l’irréparable en mettant fin à ses jours. La vidéo, qui dure sept minutes, se focalise sur « l’après » drame, sous forme de flashbacks dans lesquels chaque élève se remémore son comportement face au calvaire que subissait leur camarade.
Projetée durant les portes ouvertes de l’école, elle a eu son petit effet : certains enseignants ont été émus et d’autres élèves ont été surpris par la qualité du jeu d’acteurs de leurs aînés. Pour leur professeur, madame Fouzia Hajji, ils se sont véritablement intéressés à cette problématique et se sont beaucoup impliqués dans la réalisation. « Au départ, on pensait même faire une sorte d’expérience sociale », explique l’un des élèves. « Mais c’était difficile à mettre en place alors on a décidé de faire une vidéo. »
Un phénomène en pleine croissance
Pour ces jeunes, parler de cyberharcèlement ne va pas de soi. À la question « avez-vous déjà été témoin ou victime de harcèlement scolaire », ils réagissent avec beaucoup de réserve. C’est un sujet difficile à aborder. « On sait que ça existe, on y a déjà tous été confronté d’une façon ou d’une autre » explique l’un d’eux.
Dans un rapport de l’UNESCO publié de 2017, 246 millions d’enfants et d’adolescents dans le monde ont été touchés par le harcèlement à l’école. Le cyberharcèlement chez les jeunes est considéré comme un problème croissant.
D'après plusieurs enquêtes menées auprès des belges âgés de 12 à 18 ans, un jeune sur 3 avoue avoir déjà été victime de cyberharcèlement au moins une fois dans sa vie tandis qu'un sur 5 avoue en avoir été l'auteur. Par ailleurs, 76 % des jeunes interrogés affirment qu'il ont déjà été témoins d'une situation de (cyber)harcèlement, sans pourtant être impliqués ou même agir.
L’enjeu face à cette problématique réside dans la structure même de la société actuelle ; à l’heure du tout numérique, il est très difficile voire impossible de ne pas être connecté. Là où le harcèlement s’arrête aux frontières physiques, le cyberharcèlement ne connaît pas de répit dans la sphère virtuelle. Et celle-ci est devenue quasiment indissociable de la vie réelle.
Le dialogue comme solution préventive
Qu’il s’agisse de cyber-violence (c’est-à-dire de propos diffamatoires, discriminatoires, humiliants, agressifs, injurieux ; les incitations à la haine, les intimidations, moqueries, menaces…) ou de cyberharcèlement (c’est-à-dire la répétition intentionnelle d’une ou plusieurs formes de cyberviolence, dans la durée), les conséquences peuvent être dramatiques : solitude, anxiété, isolement, perte d’estime de soi, dépression, suicide… C’est pourquoi il est primordial de rester attentif et de valoriser le dialogue et la communication comme solution préventive.
« Il est essentiel de libérer la parole et d’ouvrir le dialogue. Certains élèves sont timides et manquent de confiance en eux. Ce genre de projet peut donc leur permettre d’aller vers les autres et de consolider des liens tout en faisant de la prévention et de la réflexion sur un sujet grave qui nous concerne tous » explique Fouzia Hajji.
Pour ces élèves, l’exercice a été l’occasion de réfléchir ensemble à un sujet qui les concerne directement. Cette dynamique collective, en plus de leur donner une meilleure compréhension du phénomène, leur aura donc permis de consolider leurs liens et de prendre davantage confiance en eux.
Visionnez la vidéo réalisée par les élèves de l'Institut Diderot
*** Merci à madame Fouzia Hajji et à ses élèves pour leur temps et leur témoignage ***
Le projet pédagogique et éducatif de la Ville de Bruxelles place cette problématique au centre de ses préoccupations et la lutte contre le harcèlement et le cyberharcèlement est un objectif constant. D'autres initiatives ont ainsi vu le jour dans différents établissements, notamment à L'Athénée Robert Catteau ou à l'Athénée Léon Lepage.
Pour aller plus loin
- Le numéro gratuit – et son site – de la ligne « écoute enfants »
- Un dossier pédagogique réalisé par Child Focus
- Des actions spécifiques contre le cyberharcèlement
Date début: 25/09/19