Plus qu’un dépoussiérage, ce sera quasiment une renaissance pour le bâtiment Solvay du Lycée Émile Jacqmain. L’Instruction publique de la Ville de Bruxelles a débloqué 4M8K pour rénover ce bâtiment logé au cœur du parc Léopold, près des institutions européennes. Il s’agit là d’un projet de rénovation de grande ampleur. Plusieurs Départements de la Ville de Bruxelles travaillent main dans la main pour la sauvegarde du patrimoine, mais aussi pour que les élèves et les équipes du Lycée puissent continuer à travailler dans de bonnes conditions le temps des travaux.
Un peu d’histoire
Situé dans le parc Léopold, le Lycée Émile Jacqmain est principalement installé dans l’ancien Institut de physiologie de l’ULB, l’ancienne École de commerce et l’ancien Institut d’anatomie Raoul Warocquė. Une cité scientifique constituée d’une série de pavillons avait été implantée en 1880 pour le cinquantenaire de la Belgique, sur les lieux d’un ancien jardin zoologique abandonné. C’est à l’Institut de physiologie qu’eut lieu le congrès Solvay de 1927 réunissant Albert Einstein et Marie Curie.
À partir de 1930, le Lycée s’y installe et prend le nom de son fondateur : Émile Jacqmain, ancien Échevin de l’Instruction publique et des Beaux-Arts. Créé 8 ans plus tôt, en 1922, il offrait un cycle complet d’enseignement secondaire aux jeunes filles, dans l’esprit d’Isabelle Gatti de Gamond. La mixité y fut introduite quelques décennies plus tard.
Les bâtiments de l’établissement se composent de trois vestiges de l’ancienne Cité. L’Institut de physiologie de l’architecte Jules-Jacques Van Ysendijck (1836-1901), dans un style se rapprochant de l’Art nouveau, date de 1892. Les noms de grands savants y sont inscrits en façade. L’intérieur a été transformé pour accueillir des classes, mais conserve des éléments originaux. Le bâtiment de l’École de commerce, l’actuel bâtiment Solvay datant de 1908, a été intégré au Lycée en 1955. Une partie de l’Institut d’anatomie (1893) a été occupée par l’École primaire Émile Jacqmain de 1986 à 2011, date de son déménagement rue de Veronèse, pour être également investi, depuis lors, par le Lycée. L’autre partie est actuellement occupée par le laboratoire intercommunal Bruxellois (Brulabo).
Une nouvelle rénovation
Dès 2018, on commence les études pour la rénovation. Le site du Lycée Jacqmain est composé de plusieurs bâtiments dans le Parc Léopold : le bâtiment principal (ex. Institut de physiologie), et le bâtiment Solvay (ex. École de Commerce) liés entre eux par des pièces de liaison autour de la cour. Avril 2022, le projet de grande rénovation du bâtiment Solvay et annexes peut enfin commencer. Le défi ? Leur redonner leur faste d’antan accommodé aux exigences pédagogiques actuelles. La première étape, et non des moindres, est la création des installations de relogement que les élèves et enseignant·e·s ont investi dès la rentrée de septembre 2022, date à laquelle les travaux ont pu démarrer.
Le projet ci-décrit concerne donc les façades et toitures du bâtiment Solvay, ses travaux de rénovation intérieur, les pièces de liaison (salles de cours, sanitaires, vestiaires, caves) et les salles de sports.
Un projet entièrement mené par la Ville
La rénovation de l’établissement est un projet « 100 % ville ». Le Département du Patrimoine Public s’occupe du suivi du chantier. Les agent·e·s de ses unités organisationnelles travaux, patrimoines historique, entretien, énergie, techniques spéciales et les ateliers travaillent à l’unisson. I-City, en charge de l’Informatique de la Ville de Bruxelles, met également la main à la pâte en collaboration avec le CeMPA pour la relocalisation des élèves et donner l’accès aux data. La Voirie a œuvré pour tous les travaux de terrassement et l’installation des compteurs d’eau. Les Espaces verts prennent aussi part aux travaux !
Pareille coopération et pareille solidarité entre les Départements sont nécessaires pour mettre en place ce projet d’envergure de restauration et d’installations provisoires pour le bien-être des élèves et des équipes. Les façades et les toitures des bâtiments sont classées. La Ville de Bruxelles bénéficie donc de subventions de la DPC (Direction du Patrimoine Culturel) de la Région Bruxelles-Capitale qui chapeaute également le chantier. La restauration et la rénovation concernent tout le bâtiment : châssis, façades, cheminées, isolation et couverture des toitures, les parachèvements (sols, murs, électricité, chauffage, sanitaire…), modification de cloisonnement intérieur agrandissant une classe…
Rénovation de la façade
Si vous vous promenez dans le parc Léopold, vous tomberez sûrement nez à nez avec l’échafaudage qui recouvre l’école. L’équipe du Patrimoine public a passé les façades au peigne fin, brique par brique, pour déterminer celles qui doivent être remplacées. Des études et tests de nettoyage ont permis de choisir les meilleures techniques de nettoyage et rejointoyement des briques. Avant le démarrage du chantier, des études stratigraphiques ont été menées. Ces dernières ont mis à jour les couleurs d’origine des différents ornements qui embellissent l’extérieur du bâtiment. On retrouve plusieurs éléments métalliques tels que des poutres qui forment des linteaux ou celles de soutien sous la corniche de la toiture supérieure. Toutes présentaient des décorations, parfois uniques. Les magnifiques caissons en mortier au motif floral sous la corniche ont révélé une peinture ocre. Pour finir, sur la façade, en plus de la brique, et des éléments métalliques, on retrouve de la pierre bleue, mais aussi de la pierre d’Euville, blanche. Nettoyées, réparées ou remplacées, elles brilleront à nouveau une fois toute la façade restaurée.
Les 4 prestigieuses cheminées de l’établissement font également peau neuve. Le remontage est déjà en cours : 2 d’entre elles ont été restaurées et les 2 autres sont restituées. Les architectes et maitres d’ouvrage ont dû inspecter chaque pierre afin de prendre les mesures pour faire des greffes, restaurer ou remplacer le matériau. L’atelier qui s’occupe de restaurer les cheminées est celui qui travaille... sur le chantier de Notre-Dame de Paris !
Travaux de charpenterie et menuiserie
Des études approfondies menées pendant le chantier ont révélé la nécessité de renforcer les charpentes en métal (supérieure) et en bois (inférieure) pour isoler la toiture. Les châssis étant classés, une grande majorité sera restaurée. Seuls les éléments qui ont subi trop de dégradations dans le temps sont restitués. Les menuisiers apportent une importance au renouvellement des systèmes d’ouverture d’origine tout en les adaptant. Le but est d’améliorer l’ouverture en guillotine pour certains, ou de faciliter la manipulation pour d’autres. Le défi réside dans le fait de respecter les aspects originaux tout en permettant à l’école de procéder à la bonne ventilation des pièces. Certaines pièces vont se voir dotées de stores intérieurs, aux teintes d’origine.
Architecture d’intérieur
Les faux plafonds seront remplacés par de nouveaux, exception faite dans le réfectoire et dans les pièces qui présentent des plafonds à voussettes : dans ce cas les plafonds vont être enduits. Au dernier étage, des cloisons sont enlevées pour créer une grande classe polyvalente. L’installation de nouveaux sanitaires est prévue, mais pas uniquement ! Les équipes qui travaillent sur le chantier ont démonté l’ensemble des parachèvements pour tout renouveler : enduits, peinture, et revêtements de sols, l’électricité aux normes accompagnée de nouveaux luminaires, le système de chauffage entièrement changé…
Pour une restauration pérenne
Rien n’est laissé au hasard pour cette restauration. Tout est analysé, pensé, et piloté pour respecter au mieux les éléments d’origines et les défis du 21e siècle, tel que le numérique, mais aussi celui du changement climatique. L’idée est de restaurer le bâtiment pour refaire éclater son prestige d’autrefois, tout en répondant aux besoins actuels dans le but d’une rénovation pérenne.
Le Lycée Émile Jacqmain bénéficiera au final d'un écrin pour continuer à former les citoyen·ne·s éclairé·e·s de demain…
